Les Chroniques de la vente #6
Le feuilleton lemlist, harley vs enfield, créer son propre média pour vendre
Pour commencer en beauté cette chronique, voici l’article le plus complet que j’ai trouvé pour connaître les meilleurs moments pour envoyer ses campagnes de prospection e-mailing.
En gros, le mardi est un excellent jour pour optimiser le taux d’ouverture, selon 10 études sur les e-mails.
Le jeudi est pas mal également.
Et préférez le week-end si vous souhaitez un fort taux de clic sur vos e-mails.
Lemlist fait le buzz…
Je vous parlais dans les dernières Chroniques de la guerre des plateformes SEP, notamment entre Lemlist, Outreach et SalesLoft, et du souhait de Lemlist de lever 20 millions d’€ pour ne pas se faire doubler par les Américains.
Coup de théâtre dans ce qui devient un véritable feuilleton sur Youtube, Guillaume Moubeche (qui se fait appeler dorénavant G. comme dans V. for Vendetta) nous annonce dans Konbini, que lui et ses associés ont refusé une offre de 30 millions d’€ (dont 15 millions de cash-out, c’est à dire pour les fondateurs).
Saluons le talent pour le buzz qu’est en train de faire Lemlist dans la tech française (et peut être internationale ?).
Avoir documenté ses rdv avec les investisseurs en vidéo a permis de faire monter la sauce auprès de ces derniers, qui leur ont envoyé une avalanche de propositions d’investissement.
Lemlist à extrêmement bien utilisé le FOMO: Fear of Missing out: la peur de louper quelque chose, qui est sans doute le levier le plus fort pour faire bouger les VC.
Pour enfin, décider de ne pas lever ces fonds et expliquer pourquoi ce choix sur Konbini, ce qui va au passage, faire connaître Lemlist au grand public (et aux haters…).
Coup de maître ? En terme de communication oui. En terme de stratégie, l’avenir nous le dira. 3 scénarios peuvent se dessiner.
Le scénario probable selon moi: Lemlist continue sa croissance, notamment aux US, et commence à devenir un poil à gratter pour Salesloft ou une autre plateforme SEP. Ces derniers font une énième levée pour les racheter. J’ai posé la question sur ClubHouse à Guillaume, qui m’a répondu que sa volonté n’est pas de se faire racheter, mais bien de créer la première Licorne française Bootstrappée (c’est à dire qui n’a pas levé de fonds). #Couillu.
Deuxième scénario: Lemlist devient un A player, arrive à se maintenir sur le marché face à ses concurrents américains qui eux vont lever énormément d’argent. Lemlist pourra pourquoi pas dans un scénario idéal, racheter d’autres boîtes et devenir un CRM 2.0 qui commence à concurrencer les plus gros. Selon Guillaume, il y’a de la place sur le marché pour plusieurs boîtes. Compliqué selon moi, même si c’est tout le bien que je leur souhaite.
Troisième scénario, celui du pire. Force est de constater que cela va tellement vite dans la Sales Tech. Je change quasiment d’outils de prospection tous les 3 mois. Lemlist n’est pas à l’abri de se faire dépasser par un concurrent qui avec des nouvelles features et un prix bien placé, tue le game. La levée leur permettait peut-être de se prémunir de cela ?
J’imagine que les équipes de Lemlist ont ces scénarios en tête. Je pense également que Lemlist nous prépare d’autres projets pour répondre à leur ambition d’aider les entrepreneurs à construire des boîtes.
Peut-être lèveront-ils plus tard ? Peut-être revendront-ils ? Vous l’avez compris c’est mon scénario. Peut-être mourront-ils les armes à la main ou vaincront-ils ? Nous serons aux premières loges pour analyser les prochains mois.
Si G. tu veux passer dans le podcast les Héros de la vente pour nous exposer ce que tu as en tête, tu es le bienvenu !
Quand Harley rencontre Enfield
“Quoi, tu vas vraiment nous parler de moto dans une newsletter dédiée à la vente ? “ Vous devez vous demander…
Oui car il se passe quelque chose d’assez passionnant sur le marché mondial de la vente de bécanes.
L’institution historique, l’un des symboles de l’Amérique, et de la culture moto: Harley Davidson, est en bien mauvaise posture, et ce, depuis maintenant plusieurs années. Leurs ventes subissent une baisse continue. A la fois à cause des mesures protectionnistes de feu l’administration Trump, qui ont impacté à la hausse, les tarifs de leurs motos en dehors des USA. Également à cause de leur image de marque écornée, avec des produits s’adressant à des vieux bikers nostalgiques, et n’intéressant pas forcément les jeunes générations. Voici l’explication parfaite en vidéo.
Il se passe chez Harley, ce qui s’est passé avec Coca-cola dans les années 80 face à Pepsi. Les jeunes se détournent de cette marque de “boomers” (marque de vieux pour simplifier) et de ses produits chers et bruyants.
En face, une autre entreprise, également historique, un peu moins connue, mais portée elle aussi par un pays tout entier, l’Inde, est en train de battre des records de vente: Royal Enfield.
Le marché Indien est le premier marché pour les deux roues, et Royal Enfield y tient une place particulière. C’est une fierté nationale, comme autrefois Harley aux USA. C’est d’ailleurs l’armée indienne qui a permis à Royal Enfield, marque anglaise à la base, de passer les années où l’entreprise était proche du bilan. Je vous invite à regarder cette belle vidéo sur cette marque si vous voulez en savoir plus.
Ce qui est intéressant c’est de voir que ces deux marques sont sur le même segment : le “néorétro”(style ancien mais avec le confort d’une moto moderne). C’est la marque la moins connue par le grand public, l’Indienne, qui s’en sort le mieux.
Royal Enfield vend trois fois plus de motos que Harley Davidson dans le monde.
Alors oui, le marché Indien est immense, mais prenons les statistiques en Europe, et notamment en france. Harley a subi une baisse de 26% de ses ventes en 2020 quand les ventes de Royal sont restées stables. Il s’est vendu presque 4 fois plus du modèle phare de Enfield (la 650: 2023 ventes) que celui de Harley (la Sport Glide: 621 ventes). Le choc est brutal.
L’apprentissage à retenir selon moi, c’est de faire attention en permanence à son personae et son ICP (Ideal Customer Profil, c’est à dire son client idéal.) et d’évoluer avec lui ou carrément de s’adresser à un autre personae plus rentable pour son entreprise.
Harley Davidson s’est concentré trop longtemps sur un seul et même personae: en gros le vieux motard mal bourru et viril, avec des produits trop chers et plus tellement adaptés à la société d’aujourd’hui.
En face, le concurrent lui, a fait le pari de proposer des produits bon marché forcément moins qualitatifs que son concurrent Harley, mais avec une esthétique dans l’air du temps, qui lui permet d’adresser ses produits à différentes générations. Royal Enfield est en train de devenir une marque cool, qui plaît aux jeunes comme aux vieux et aussi bien en Europe, qu’en Asie et même maintenant aux USA.
Harley pour séduire ou récupérer ces consommateurs est en train de tabler sur la moto électrique.
On espère que ce ne sera pas le même fiasco pour eux que le New coke de Coca-Cola comme le montre cette vidéo:
Avoir son média pour vendre
Premier bilan après 2 semaines de tests et d’utilisation de l’application ClubHouse.
Pour faire simple et rapide: énorme potentiel, interactivité incroyable que ne permet pas le podcast, mais demande de se libérer un temps fou et beaucoup d’énergie pour organiser et maintenir des rdv réguliers, afin de profiter d’une notoriété sur ce nouveau réseau. Pour moi, c’est encore tôt pour savoir comment capitaliser et monétiser sa proposition de valeur sur cette application.
Néanmoins, l’histoire de CH m’interpelle. (Regardez cette vidéo de notre ami Yann Leonardi, très instructive, mais écoutez aussi le dernier épisode du podcast Silicon Carne de Carlos Diaz, qui parle très bien du sujet).
C’est quasiment le fonds VC Andreessen Horowitz qui a propulsé ce nouveau réseau social.
La particularité de ce fonds, c’est que depuis plusieurs années, ses équipes proposent énormément de contenu, via des blogs, des podcasts et des newsletters.
C’est quasiment devenu un média tech à part entière. Ce n’est pas un hasard si les fondateurs de ClubHouse ont été backés par ce fond, qui explique depuis un moment déjà, l’avènement d’un réseau social audio.
Avec leur bruit incessant, ce fond arrive à attirer vers eux les entrepreneurs concernés par les sujets poussés par leurs équipes chargées de contenu.
Lorsqu’ils ont investi 10 millions de Dollars aux débuts de ClubHouse (avant de réinvestir 100 millions début 2021), les “médias” de Andreessen Horowitz, ont énormément fait de bruit pour faire venir les 10 000 early adopters sur l’application.
C’est la même logique lorsque Hubspot achète The Hustle, une newsletter pour les entrepreneurs.
C’est profondément passionnant, de voir que posséder un média, et donc une communauté, permet aujourd’hui de lancer une offre, un service ou un réseau social en grande pompe. C’est d’autant plus intéressant, que maintenant les fonds, et les entreprises peuvent “facilement” créer leur propre média.
Donc aujourd’hui, quand vous lancez un produit ou une entreprise, construire une communauté, via un média (blog, podcast, , groupe Facebook, newsletter, journaux si vous vous appelez Xavier Niel…) semble être plus importante qu’avoir un produit fini.
Vous savez ce qu’il vous reste à faire…
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